L’art de (bien) manger__ فنّ الأكل (الجيّد)

Mensuel n°338 – juillet 2021__العدد الشهري 338_جويلية 2021

SOMMAIRE DÉTAILLÉ

Éditorial

• Le gastronome et l’humanologue
  Héloïse Lhérété

L’ART DE BIEN MANGER

• L’art de bien manger
  Dossier coordonné par Laurent Testot
• «La politique est née à table»
  Rencontre avec Paul Ariès
  Propos recueillis par Laurent Testot
• À chaque âge son alimentation ?
  Gilles Fumey
• Des collégiens aux fourneaux
  Émilie Orliange
• Des nourrices aux lactariums
  Mathilde Cohen
• La gastronomie, un art majeur ?
  Frédéric Zancanaro
• Le goût de l’ailleurs
  Laurent Testot
• Slow Food, des nourritures militantes
  Gilles Fumey
• Les circuits courts, une réponse face aux crises ?
  Yuna Chiffoleau
• Bien manger pour bien produire
  Frédéric Denhez
• Nourrir 10 milliards de Terriens en 2050
  Sébastien Abis et Matthieu Brun

LE POINT SUR…

• Inceste, la levée d’un tabou ?
  Hélène Frouard

ENTRETIEN

• Michel Winock
  Un intellectuel dans le siècle

RÉFÉRENCES

• Abraham Maslow
  De quoi avons-nous vraiment besoin ?
  Marc Olano, journaliste scientifique

ACTUALITÉ DE LA RECHERCHE

• Muriel Darmon, une sociologue à l’hôpital
• Élever la voix ou froncer les sourcils ?
  Marc Olano
• Les hikikomori, des jeunes confinés avant l’heure
  Marc Olano
• L’apprentissage de la lecture grippé par la crise
  Emmanuelle Picaud
• Les filles et le football : pas facile !
  Florine Galéron
• Le temps des cerises japonaises
  Hélène Frouard
• Du danger d’avoir une fourmi comme animal de compagnie
  Hélène Frouard
• Transformer nos forêts ?
  Tom Umbdenstock
• La philosophie en pédalant
  Emmanuelle Picaud
• Des hospices pour les nobles
  Salomé Tissolong
• La désillusion des soldats soviétiques
  Jean-Marie Pottier
• Les pistes de l’Ouest américain
  Salomé Tissolong
• De Guignol à Gambetta
  Hélène Frouard
• Les débuts de l’alphabet
  Vincent Capdepuy
• Les Chinois de France, au-delà des stéréotypes
  Tom Umbdenstock
• Quand les parents épousent l’air du temps
  Flora Yacine

Extrait de l’Editorial:__________مقتطف من الافتتاحية

يفصل ما بين « جان أنتالم بريلات-سافارين » و »جان-فرانسوا دورتييه » قرنان من الزمن. وبغض النظر عن هذه التفاصيل، هناك نقاط مشتركة بين مؤلف كتاب فن الأكل الجيد   ومؤسس مجلة علوم إنسانية  .  ولد كلاهما في نفس المكان ، في « بيلي « ، في منطقة « بوجي »، تلك المنطقة الجبلية والمنتجة للنبيذ الواقعة في « شرق الآين ». لقد توخى هذان الشخصان المتميزان ومتعددا الخبرات طريقهما بمفردهما بعيدًا عن المسارات المحددة، فكانا فضوليين وجريئين في رغبتهما في تلخيص المعارف المتاحة. كان « بريلات سافارين »  وهو طفل جدير بالانتماء إلى التنوير، مهتمًا بالموسيقى والطب وعلم الآثار والكيمياء والعلوم السياسية. وكان  دورتييه طالبًا في الرياضيات والفلسفة ثم طالب دكتوراه في علم الاجتماع ، قبل إنشاء مجلة علوم إنسانية مع بعض الأصدقاء في عام 1988. أتاح لهم مسارهم المتعرّج شق طريقهم عبر تعقيد العالم. من المشمش المُسكر إلى حساء  « واتر سوشيه »، جمع « بريلات-سافارين » حوالي 1600 وصفة في كتبه. بل فعل أكثر: أسس فن الطهو، ذلك العلم الذي يهدف إلى « معرفة كل ما له علاقة بالإنسان باعتباره كائنا متغذ « . لقد فهم شيئًا « بريلات-سافارين » أساسيًا: ألا وهو أن الطعام ليس مجرد مسألة حاجة، بل هو خيال واتصال. إن نسبة فن افن الطهو إلى الطعام هي كنسبة  الإثارة الجنسية إلى الجنس: إنه تنظيم لمشهد رغباتنا، سواء أكانت حسية أو هووية أو اجتماعية أو سياسية، خروج من الحيوانية وتجسيد لإنسانيتنا.

Jean Anthelme Brillat-Savarin et Jean-François Dortier ont deux siècles d’écart. Ce détail mis à part, il existe de savoureux points communs entre l’auteur de L’Art du bien manger et le fondateur de Sciences Humaines. Tous deux sont d’abord nés au même endroit, à Belley, dans la région du Bugey, cette région montagnarde et viticole situé dans l’Est de l’Ain. Exceptionnels touche-à-tout, ils ont tracé leur route en solitaires, loin des sentiers balisés, curieux et intrépides dans leur volonté de récapituler les savoirs disponibles. Digne enfant des Lumières, Brillat-Savarin s’intéressa autant à la musique qu’à la médecine, l’archéologie, la chimie ou à la science politique. J.F. Dortier fut étudiant en maths, en philosophie puis doctorant en sociologie, avant de créer avec quelques amis, en 1988, la revue Sciences Humaines. Leur parcours en zigzag leur permit de se frayer un chemin dans la complexité du monde. Des abricots confits au potage Water-Souchet, Brillat-Savarin rassembla dans ses livres quelque 1 600 recettes. Il fit plus : il fonda la gastronomie, cette science qui vise « la connaissance de tout ce qui a rapport à l’homme, en tant qu’il se nourrit ». Il avait compris quelque chose d’essentiel : l’alimentation ne relève pas seulement du besoin, mais de l’imaginaire et du lien. La gastronomie est à la nourriture ce que l’érotisme est à la sexualité : une mise en scène de nos désirs, qu’ils soient sensoriels, identitaires, sociaux et politiques. Une sortie de l’animalité et une figuration de notre humanité.